Wallace

Comme promis, je vous reparle de Wallace. Pourquoi, au juste? Ce gars-là est tellement sympathique, aidant et attentionné. “C’est sa job”, tu vas me dire. Y’a un peu de ça. Wallace est Chinois, donc son vrai nom c’est pas Wallace, c’est Wei Ping. C’est drôle, ça. Les Chinois qui travaillent en anglais se donnent tous un nom anglophone. Est-ce qu’ils se trouvent plus crédibles de même, ou c’est pour leurs partenaires étrangers étroits d’esprit? Chu pas certain. N’empêche que j’ai beau trouver ça comique, j’pense quand même que c’est stupide. Moi par exemple, je suis en Chine et je travaille ici, mais j’ai encore le même nom. J’m’en fous ben s’ils ont de la misère à prononcer Charles, c’est ça mon nom! Pas Charlse, Chang ou Chan… bref, c’était mon éditorial. Mais je digresse…

Ah oui, Wallace. C’est le superviseur des enseignants étrangers à l’Institute of Business and Technology de Yāntái pis il s’occupe de tout. TOUT. Envoyer quelqu’un venir te chercher à l’aéroport, ton logement, tes examens médicaux, ton visa de résidence, ton téléphone cellulaire, t’ouvrir un compte de banque, verser ton salaire, te trouver une autre job si tu veux, name it, il le fait sinon il envoie quelqu’un le faire. T’as une question, tu demandes à… Wallace. L’autre fois je lui ai demandé: “J’ai besoin d’un adapteur pour brancher mes trucs électroniques dans vos prises chinoises de marde, où est-ce que je peux trouver ça”? Il m’a amené en acheter un. Des fois on passe à côté d’une machine distributrice, il me demande: “T’as soif”? J’y réponds « non merci, t’es ben fin ». Ben il m’achète quand même un thé glacé avec Avril Lavigne dessur.

Ping (Wei est son nom de famille) a 34 ans, une femme qui sourit toujours et une petite fille de 19 mois. Son nom anglophone c’est Jane, en l’honneur d’une ex-prof d’anglais originaire de Medicine Hat. Le gars travaille tout le temps, même que ces temps-ci il a mal à la gorge même si le mercure frôle les 30 degrés avec l’humidité. Et d’après ce que j’entends entre les branches, il fait pas un gros salaire… comme bien d’autres Chinois d’ailleurs. Vendredi passé, il m’a amené souper à l’hôtel le plus cher de la ville avec Lisa, une probablement future boss dont je vous reparlerai aussi. Bref, de la bouffe écoeurante, de la bonne bière, sur leur bras pis toute. Après le souper il me dit: “Charlie, on se voit demain avant-midi pour aller ouvrir ton compte de banque. Mais si je t’appelle plus tard, c’est parce que je vais dormir demain matin”. Mais repose-toi, saperlipopette! Finalement, on est allés… dimanche après-midi.

L’autre fois dans l’autobus, je lui ai demandé: “Wallace, aimes-tu ta job”? Il a soupiré et levé les yeux au ciel: “I hate the job, but I love the people”. Bref… Wallace, c’est lui. Un gars qui travaille trop pour qu’on puisse s’adapter le mieux possible à notre nouvel environnement. Un gars qui travaille plus fort que nous pour un salaire moindre. Un gars qui reçoit des ordres de ses supérieurs pour que des étrangers soient mieux traités que le peuple lui-même. Un bienfaiteur, un deuxième père pour nous tous. Xiè xiè nǐ, Ping.